Thomas, de l’entrepreneuriat social au conseil climat
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Je suis le troisième de l’équipe à me lancer dans l’exercice, après mes collègues Raphaël et Pierre-Louis. Je risque de manquer d’originalité puisque, comme eux, j’ai très bon moral avec toutefois une légère dose d’éco-anxiété, pas aidé par les chaleurs estivales de cette fin octobre.
Côté pile, ou plutôt vie pro, j’ai la chance de faire partie de cette joyeuse bande de consultants-militants qu’est l’équipe Carbon Cutter. Au quotidien, j’essaye de faire de mon mieux pour accompagner nos clients à travers le chemin tortueux de la transition bas-carbone.
Côté face, j’ai une passion parfois un peu débordante pour le vélo, donc je fais souvent des tours de roues en vallée de Chevreuse ou sur les bords de Marne. Et j’essaie aussi de dédier un peu de temps à mon engagement bénévole au sein de l’association Paris en Selle – qui cherche à promouvoir les mobilités douces dans la capitale -.
C’est le fruit d’un long processus.
Avec le recul, les prémices furent ma seconde expérience de stage lors de ma césure.
Par un étrange hasard, j’ai eu l’occasion de travailler six mois pour un bureau de fabrication de bijoux franco-indien basé à New Delhi. Entre autre, j’avais un rôle de “contrôleur qualité”, ce qui m’a amené à faire de nombreuses visites dans les usines des marques bien connues de la fast-fashion. J’ai un souvenir prononcé des chaînes de production H&M, à 2 heures de transport de Bombay, et des conditions de travail des ouvrières. Bien entendu, on a tous déjà vu un reportage sur la délocalisation dans les pays à bas-coûts et l’on sait ce qui se cache derrière le “Made in”. Mais on a tendance à l’oublier. Lorsqu’on est sur place et que l’on a des palettes de produits qui se font retoquer à la douane à cause d’une teneur en plomb trop élevée, c’est une autre affaire.
L’Inde est un pays très concerné par les questions environnementales. À cause du changement climatique, la mousson et les pratiques agricoles se dérèglent et les vagues de chaleur gagnent en intensité. Les pollutions – plastiques notamment – sont omniprésentes. Dans le même temps, le développement économique est au moins aussi rapide que la hausse de la consommation de charbon. L’urgence de la transition écologique saute aux yeux à chaque instant, tout comme le défi de sa mise en oeuvre.
A mon retour, cette réflexion a progressivement mûri. J’ai eu deux premières expériences professionnelles qui m’ont permis d’aborder des questions connexes aux enjeux climatiques. Avec l’équipe de l’Increvable – un projet de machine à laver conçue pour durer un demi-siècle – j’ai d’abord pu approfondir les enjeux d’obsolescence programmée et d’économie circulaire. Puis j’ai rejoint le projet Vendredi, une plateforme SaaS par laquelle nous cherchions à renforcer l’engagement des salariés au travers du mécénat de compétences. Le mécénat de compétences, c’est comme le mécénat financier, sauf que cette fois l’entreprise donne du temps de travail de ses salariés. J’y ai découvert la richesse et l’énergie du monde associatif, comme la profondeur des problèmes sociaux et environnementaux auxquels il fait face.
Mais quelque chose me manquait. J’ai fini par avoir envie de quitter le monde de la “tech’” – nous étions notamment accélérés à Station F – pour me consacrer plus fortement aux questions environnementales. Et c’est là que j’ai ouvert les rapport du GIEC, la seconde étape de cette transition.
Je me suis permis de prendre une année de jachère, durant laquelle je consacrais bien deux jours par semaine à me renseigner sur les questions environnementales. Les rapports du GIEC donc, mais aussi les cours de JMJ à l’école des Mines, les webinars de Carbone 4, etc. D’ailleurs, maintenant que je suis de l’autre côté de la barrière et que je rencontre des candidats en entretien, je me rends compte que chacun a ses lectures charnières, tel livre ou tel article qui le fait un peu plus basculer. C’est une question que j’adore poser ! De mon côté, le rapport B&L Evolution “Comment s’aligner sur une trajectoire compatible avec les 1,5°C” marque un avant et un après. Quand on parcourt l’inventaire de tout ce qu’il faudrait faire pour tenir les objectifs auxquels on s’est engagé, on est pris de vertige. Cela semble injouable ! Et en même temps, l’alternative, c’est un climat qui se réchauffe de façon incontrôlée et c’est loin d’être préférable.
Alors on fait comme Pascal. Puisque pour y arriver, il faut de toute façon y croire et faire les efforts nécessaires, on se dit qu’il y a un chemin pour la transition et on commence à s’y consacrer. Quelques mois plus tard, je rencontrai Adrien par le biais des Shifters – le collectif de bénévoles du Shift Project – et on démarrait Carbon Cutter (à l’époque Magelan) dans la foulée.
Quand on a démarré avec Adrien, au moment du premier confinement, on était encore assez novice sur le sujet. On sortait tout juste de cette longue phase de prise de conscience. Mais on partageait au moins une conviction : vu qu’une très large partie des entreprises en place n’ont pas de modèles compatibles avec un monde 2°C, et qu’on ne va pas juste licencier les 26 millions d’actifs en France pour résoudre le problème, il va falloir des bras pour transformer tout ce beau monde. Et en parallèle développer de nouvelles approches pour accompagner tous types d’entreprises. Si vous êtes une PME de 20 salariés qui fabrique des fours à pains, pas sûr que la méthode SBTi soit la plus adaptée pour vous. Mais alors, vous devez faire quoi ? Et pour aller où ?
Finalement, plus que des convictions, nous avions surtout beaucoup de questions…
Au quotidien, je développe et anime des programmes de formations aux enjeux climatiques – notre fameuse “Académie du climat” – et j’accompagne nos clients sociétés de gestion et PME/ETI dans la mise en œuvre de programmes de transformation bas-carbone. Évidemment, quelle que soit notre ancienneté dans l’équipe, on fait tous de l’accompagnement client et de l’opérationnel. C’est cela qui nous anime !
Le reste du temps, je travaille à faire grandir notre activité. Je coordonne notamment le recrutement des futurs membres de l’équipe – d’ailleurs, on a quelques belles offres en ligne – et je passe du temps sur des sujets de développement – nos études open-source ou la vente de certains programmes -.
Finalement, pas mal de choses !
Tout d’abord, je pense que cela m’a permis d’être vraiment très aligné avec mon activité professionnelle. Mine de rien, ne plus avoir à se demander pourquoi on se lève le matin, c’est un surplus de confort très appréciable.
Plus largement, je prends beaucoup de plaisir à évoluer dans cet écosystème de gens qui agissent sur les questions climatiques et de biodiversité. On se sent assez vite relié entre pairs, on partage une expérience et un défi commun. Par exemple, on a eu l’occasion de faire quelques présentations de notre étude “6 étapes pour démarrer sa stratégie climat” à l’international – aux Philippines et aux Etats-Unis notamment – et à chaque fois j’étais étonné de la facilité des échanges entre nous, dû au simple fait que tous les interlocuteurs autour de la table – ou derrière leur visio – avaient une conscience partagée du problème.
Enfin, je pense que ces trois années à explorer plus en profondeur les sujets environnementaux m’ont poussé à mieux comprendre le vivant et les écosystèmes. L’initiative “4/1000 : pour la santé des sols”, qui postule que si l’on augmente la teneur en carbone des sols cultivés de la planète de 0,4% par an, on peut capter chaque l’équivalent de nos émissions annuelles, m’avait frappé. Un grand nombre de solutions sont autour de nous ! Depuis, j’aime beaucoup explorer les différentes initiatives qui portent sur le réensauvagement ou la renaturation, et voir ce qu’elles peuvent nous apporter. Je trouve que c’est une source d’espoir immense !
Alors pour finir, petit conseil lecture : Le réensauvagement de la ferme à Knepp, qui porte sur un programme de renaturation d’une ex-ferme en agriculture conventionnelle en Angleterre.
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